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À l’ère du global English, la question de l’interaction entre français et anglais est de plus en plus actuelle et elle s’inscrit dans de nombreux contextes. Si elle se donne quotidiennement à entendre à travers l’usage du « franglais », certains gallicismes ou encore l’absence de traduction de termes techniques anglophones, il convient d’interroger cette relation qui peut parfois s’avérer problématique. 

Affiches JE (FR_EN)
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L’adoption de certaines lois destinées à encadrer une cohabitation jugée dangereuse, comme la loi Toubon en France ou encore la loi 101 au Québec, nous pousse à observer de plus près la nature de ces interactions. En effet, comment s’illustre formellement ce rapport entre français et anglais ? Comment se manifestent des phénomènes linguistiques tels que l’interférence, l’emprunt ou encore le code switching et code mixing dont l’appellation elle-même met en exergue l’interpénétration constante des deux langues.

De plus, certains écarts entre ces deux langues ne sont pas traduisibles et ne provoquent pas le même effet sur l’auditoire. Par exemple, le fait que la langue française soit genrée alors que l’anglais ne l’est pas peut amener à certaines incompréhensions. Il existe plusieurs méthodes pour approcher une analyse linguistique de ces différences, nous noterons ici tout particulièrement des analyses sémantiques, qui questionnent les écarts dans l’expression de la modalité et de l’engagement (commitment) du locuteur. Nous noterons également la question du rapport au monde et des actes de langages développé par Austin et Searle ; y-a-t-il un écart, au delà des mots, dans la manière dont les locuteurs se rapportent au monde en fonction de la langue qu'ils utilisent? Cette question fait écho à l’idée de thinking for speaking développée par Slobin. En effet, cette hypothèse veut que les locuteurs énoncent leur phrases à la fois en fonction de leur compréhension d’une situation, et de ce qui est possible d’exprimer dans leur langue. Questionner l’interaction entre français et anglais, c’est donc à la fois comprendre les différences formelles entre ces deux langues et déterminer comment ces différences peuvent avoir un impact dans la communication.

Ce rapport complexe entre l’anglais et le français s’illustre également en littérature. Certains auteurs, comme Jacques Prévert avec « Chant song » (1949), soulignent le potentiel ludique de cette interaction, tandis que d’autres, comme Michèle Lalonde avec « Speak white » (1968), dénoncent un impérialisme linguistique. Dans quelle mesure ces deux perceptions antagonistes dépendent-elles du contexte (géographique, social, culturel, etc.) dans lequel elles prennent place ? De quelle manière l’usage de ces langues peut-il traduire des rapports de force idéologiques ?Les différences formelles entre l’anglais et le français peuvent-elles permettre d’expliquer un décalage dans leur usage artistique ou leur usage conjoint développe-t-il au contraire une nouveauté du sens, autant linguistique que littéraire ?

Cette première rencontre entre le pôle Canada et le pôle Washington de l’Institut des Amériques entend poser ces questions lors d’une journée d’étude le lundi 30 mai 2022. Ouverte exclusivement aux jeunes chercheur.euse.s qui souhaitent présenter leurs travaux, cette journée d’étude en ligne cherche à mettre en relation des mastérant.e.s et doctorant.e.s de différentes disciplines. En effet, la question de l’interaction linguistique entre le français et l’anglais concerne plusieurs domaines en sciences humaines et sociales en dehors de la linguistique et de l’étude littéraire : l’histoire ou la sociologie, par exemple, peuvent rendre compte de ces interactions variées. Le but de cette journée est donc de faire un état des lieux des intérêts de la jeune recherche sur les questions portant sur l’interaction entre les deux langues et d’apporter des nouvelles pistes de réflexion entre chercheurs français et américains concernant cette problématique volontairement large. Ce serait l’occasion pour les participant.e.s de converser en tant que spécialistes bien sûr, mais également en tant que locuteurs de leurs langues respectives, en prévision d’un colloque international  organisé en 2023.

La journée d’étude accueillera des communications individuelles de 20 minutes en français et en anglais. Ces présentations seront suivies de 10 minutes de questions et d’échanges avec le public et les autres intervenants. Les propositions (descriptif de 250 mots ainsi qu’une courte notice biographique) sont à soumettre dans la langue de votre choix à l’adresse je.canada.washington@gmail.com avant le vendredi 15 avril minuit.

Bibliographie

ÉTIEMBLE, René, Parlez-vous franglais [1964], Paris, Gallimard, 1973.

GAUVIN, Lise, Langagement. L’écrivain et la langue au Québec, Montréal, Boréal, 2000

RUTMAN, Rainier, « Le bilinguisme littéraire comme relation intersystémique », Canadian Review of Comparative Literature/Revue Canadienne de Littérature Comparée, vol. 17, n° 3 et 4, septembre-décembre 1990, p. 198-212. Consulté dans https://ejournals.library.ualberta.ca/index.php/crcl/issue/view/266, le 6 février 2022

GOBARD, Henri, L’Aliénation linguistique (analyse tétraglossique), Paris, Flammarion, 1976

KASHAMA, Mulamba, “Social beliefs for the realization of the speech acts of apology and complaint as defined in Ciluba, French, and English”, Pragmatics, vol. 19, 4, Janvier 2009, p. 543 - 564.

LAVIDAS, Nikolaos and BERGS, Alexander, “On historical language contact in English and its types: state of the art and new directions”, Linguistics Vanguard, De Gruyter, February 2020.

SALKIE, Raphael, “Modality in English and French: A corpus-based approach”, Language Sciences, vol. 18, 1–2, Janvier–Avril 1996, p. 381-392.

SLOBIN, Dan I. (1996). From "thought and language" to "thinking for speaking." In J. J. Gumperz & S. C. Levinson (Eds.), Rethinking linguistic relativity (pp. 70–96). Cambridge University Press. (Reprinted in modified form from "Pragmatics," 1,1991, pp. 7–26). 

THORDARDOTTIR, Elin T., “Early lexical and syntactic development in Quebec French and English: implications for cross-linguistic and bilingual assessment”, International Journal of Language & Communication Disorders, vol. 40, 3, 2005, p. 243-278.

Appel à communications
Date limite de l'appel: 15 avril 2022
00h00
Com o apoio do IdA
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